De l’intérêt de la physique quantique ?

Une révolution…

Acte 1 : Planck et Einstein

Invention du premier quart du dernier siècle, ce changement de paradigme qu’est la théorie quantique nous explique plus finement le monde et nous repositionne par rapport à lui du point de vue épistémologique.

En un premier temps, celle-ci est intégrée par la physique, et ce dans la plupart de ses branches (toute la haute technologie qui nous environne en découle).

La théorie quantique concerne le monde microscopique, celui de l’infiniment petit dont elle sonde les entrailles en étudiant les atomes et les particules quantiques (électrons, photons, protons…) et les champs.

Petit historique de cette « révolution » et de ses implications.

A la fin du XIXe siècle, les savants sont dans un état fébrile frôlant le délire prométhéen. L’esprit rationnel est triomphant. L’homme domine de sa pensée et de ses technologies la nature.

Tout semble avoir été élucidé. Les progrès techniques sans précédent qui ont permis la révolution industrielle et l’amélioration du confort matériel valident ce succès (lois de l’électromagnétisme, de la chimie, de la gravitation, de la thermodynamique). Solidement assises sur des équations mathématiques, dans tous les domaines de la physique, ces lois rigoureuses sont à disposition. Celles-ci permettent d’expliquer les phénomènes observés dans la nature ou en laboratoire, de prédire des résultats nouveaux et d’inventer des technologies.

Cette science matérialiste et réductionniste chasse de son champ d’études la conscience et la pensée, car non matérielles. Elle évacue aussi de son discours l’hypothèse de Dieu. La nature est perçue comme sans âme. Une machine d’une inouïe complexité, mais dont on doit pouvoir démonter les pièces, les engrenages. Ainsi les sciences du vivant suivent ce même chemin mécaniste que la physique. On dissèque, pour les analyser, les êtres vivants, on les dissocie en organes, en cellules, puis en organites, en molécules…

Le nec plus ultra de cette vision « horlogère » du vivant s’exprime dans le jeu de Lego des protéines et de l’ADN. Quant aux neurologues, ils désassemblent le cerveau en zones responsables de telle ou telle part de notre expérience, en réseaux de neurones qu’affectionnent tout particulièrement les informaticiens et envisagent la conscience comme simple conséquence de cette machine à traiter l’information qu’est le cerveau…

… cependant, il restait deux ou trois problèmes non réglés concernant les ondes lumineuses…

L’effet photoélectrique notamment : la façon dont la lumière interagit avec un métal dans l’ultraviolet.

Et « le rayonnement du corps noir » ou l’allure du spectre lumineux d’un objet que l’on chauffe. Ce spectre thermique (intensité de la lumière en fonction de la longueur d’onde) adopte une forme de cloche très particulière, qui ne dépend que de la température de l’objet qui le rayonne. Un exemple en est la couleur du métal dans une forge, qui change avec la température. La théorie ondulatoire de la lumière (on savait que la lumière était constituée d’ondes électromagnétiques) ne fournissait aucune explication.

Un autre exemple plus spectaculaire est le rayonnement « cosmologique » émis par l’Univers lors de sa prime jeunesse et découvert dans les années 60.

C’est en 1900 qu’un jeune physicien allemand Planck en trouve l’explication. Pour retrouver par calcul le spectre du corps noir, il recourt à une astuce mathématique : il fait « comme si » l’énergie emportée par la lumière à chaque longueur d’onde était une accumulation de nombreux paquets transportant chacun une quantité d’énergie minuscule. Eurêka, il retrouve exactement la forme des spectres mesurés ! C’est le même principe que les « pixels » d’un écran d’ordinateur. Les images paraissent lisses, mais en les grossissant avec une loupe on observe des petites unités qui composent l’écran.

Ainsi, ce que Planck découvre pour l’énergie de la lumière, c’est qu’à notre échelle elle nous paraît bien lisse, mais qu’elle est en réalité granulaire. Et ces grains de lumière, ce sont les « photons ».

C’est alors que le jeune Einstein entre en scène en reprenant le concept pour l’appliquer à l’effet photoélectrique. Et bingo ! il résout cet autre mystère de la lumière !

Cette découverte fondamentale de Planck et Einstein consiste à quantifier une grandeur physique qu’on appelle « l’action » (ou produit de l’énergie par le temps). Dit autrement, cette grandeur physique ou « action » est composée de « briques » élémentaires qui ont toute la même valeur. Cette brique d’action ultime s’appelle le « quantum d’action » ou encore la constante de Planck. Elle est minuscule, mais elle n’est pas nulle et c’est ce qui fait que le monde est comme il est !

Ainsi, ce concept délicat à saisir, à savoir que la lumière est tout en même temps onde électromagnétique et granulaire constituée de photons, particules sans masse qui transportent chacune un « quantum » d’énergie est le premier pavé jeté dans la mare de la physique. Ces aspects ondulatoires et corpusculaires de la lumière semblent à première vue incompatibles, contradictoires. Dans certaines expériences (par exemple la diffraction par un petit trou percé dans un écran) la lumière se manifeste comme une onde. Dans d’autres, sous la forme de corpuscules.

Second pavé dans la mare, quinze ans plus tard, le physicien français de Broglie.

Il se dit que les particules qui composent la matière (les électrons, les noyaux d’atomes) devraient être observées de plus près ; ne sont-elles pas, sous certaines conditions, aussi des entités ondulatoires ? Intuition confirmée. L’onde associée à la lumière est un champ électromagnétique qui se propage dans le vide. Il était logique d’associer à l’« onde de matière » de de Broglie un autre « champ de force ».

Acte 2 :  L’Ecole de Copenhague

1920, la question de la nature de l’onde de matière bouscule les acquis de la physique classique. Niels Bohr[1], Erwin Schrödinger[2], Werner Heisenberg, Wolfgang Pauli[3], Paul Dirac[4] vont poursuivre le chemin.

Pour les tenants de l’« interprétation de Copenhague », l’onde de matière associée à l’électron et toutes les autres particules de matière (neutrons, protons et particules subatomiques sont bientôt découverts) ne correspond à aucun champ physique.

L’entité qui pulse et se propage à la manière d’une onde est une « densité de présence » de la particule de matière. Elle ne décrit qu’une « potentialité » de la particule à exister à tel endroit et tel instant. Cette onde de probabilité quantique est comme une vague, capable de se déplacer, de diffracter, de faire des interférences… ainsi, si l’on regarde une crête de l’onde, on sait seulement que la particule a de grande chance de s’y trouver, mais elle n’y est pas forcément.

Tel est l’aspect révolutionnaire.

La physique classique décrivait un monde où les choses et leurs caractéristiques existent de « façon certaine », que l’humain soit présent ou pas. On utilisait les probabilités quand on ne disposait pas des informations nécessaires pour faire des calculs rigoureux.

Par exemple, pour un gaz constitué de milliards d’atomes dont il faudrait connaître toutes les positions et les vitesses afin d’en prédire la trajectoire : la thermodynamique des gaz était nécessairement une science statistique.

Avec la physique quantique, le sens que prennent les probabilités dans les calculs est tout autre. Il n’y a pas de « certitude » nous échappant pour cause de complexité, mais une « indétermination », un « flou » inhérent à la nature intime du monde.

Les calculs quantiques nous décrivent avec une immense précision le comportement d’entités qui ne sont pas totalement « incarnées ». Un objet quantique ressemble à un fantôme et non à un objet bien identifié et localisé. Il peut se trouver ici ou là, ou plutôt ici ET là, et assumer en même temps des propriétés distinctes, voire même incompatibles.

On parle de superpositions d’états quantiques. Comme des calques posés les uns sur les autres.

L’objet existe potentiellement avec une certaine quantité de mouvement, un certain moment magnétique, un certain mode, etc. Le calcul quantique va prédire de manière très précise son comportement « probable », mais il sera incapable d’affirmer ce que telle mesure donnera. L’objet quantique sera identifié et localisé avec ses différents attributs seulement s’il y a une mesure, une observation. Il dispose d’une liberté insolente et « joue »  avec une palette de possibilité sans choisir. Les différentes possibilités interfèrent entre elles, s’annulent, se respectent, à la manière des ondes.

Le véritable substrat de la matière est l’écheveau de toutes les possibilités non encore « réalisées » !

Ann Defrenne-Parent

17/10/2022


[1] Niels Bohr a proposé que les électrons, les protons, … étaient à la fois des particules et des ondes.

[2] Erwin Schrödinger a découvert l’équation d’onde qui porte son nom.

[3] Wolfgang Pauli a décrit les particules élémentaires des champs quantiques.

[4] Paul Dirac prédit l’antimatière en mettant la relativité dans les équations d’ondes de mécanique quantique pour l’électron Fermion.

« L’avantage du désordre c’est qu’il se transforme en ordre, tôt ou tard »

Les notions d’ordre et de désordre sont habituellement envisagées à une échelle donnée.
Ainsi, la mécanique statistique décrit comment un ordre macroscopique émerge du désordre microscopique des molécules en agitation thermique. Mais il existe des phénomènes, dis « critiques » où ce désordre microscopique est amplifié, jusqu’à devenir observable à notre échelle.

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L’irréversibilité du temps est-elle une illusion ?

Qu’il s’agisse des phénomènes liés à la vie, des réactions chimiques, les processus irréversibles abondent dans la nature, et pourtant les équations fondamentales de la dynamique sont réversibles.
Cependant, le second principe de la thermodynamique affirme l’existence d’une irréversibilité macroscopique alors que les physiciens estiment que cette notion n’a pas de base objective à l’échelle microscopique.

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